Va-t-on vers un Printemps malien?

Les lubies de la brumeuse pandémie de coronavirus n’auront pas empêchés aux maliens de se rassembler vendredi dernier dans les rues de Bamako pour faire face au régime du Président Ibrahima Boubacar Keita. Critiqué depuis un certains temps sur sa mauvaise gestion des questions sécuritaires du pays qui se trouve de plus en plus menacé par les niaiseries des groupes rebelles du nord, le Président IBK ne cesse de perdre l’opinion du peuple et des plus hauts dignitaires du pays qui, dans un passé récent, l’avaient pourtant soutenus dans certaines opérations.

Ils étaient plus de 15.000 manifestants selon les organisateurs et 10.000 selon la police malienne à répondre à l’appel du célèbre Imam Mahmoud Dicko, Président du Haut conseil islamique du Mali, ainsi qu’au Chérif de Nioro Sahel, Chérif Bouyé Aidara, grand guide religieux, pour réclamer la démission de Ibrahima Boubacar Keita réélu depuis 2018 pour un second mandat. Cette vaste manifestation a vu la participation de la société civile malienne, des partis politiques de l’opposition, des syndicats d’enseignants et de cheminots en grève depuis des mois, des représentants de la principale association peulh du Mali (Tabital Pulaaku) et des associations de parents d’élèves. Ces derniers ont constitué une nouvelle alliance avec à sa tête le très puissant Imam Dicko qui, jusqu’à un passé récent, avait soutenu le Président IBK dans ses nombreux dialogues de paix entrepris avec les groupes armés nord maliens. En effet, le Mali est en proie depuis 2012 à une profonde crise multiforme, sécuritaire, politique et économique Ainsi, confrontées à ces récurrentes crises auxquelles s’est ajoutée celle pandémique, les populations maliennes sont sorties en masse pour exiger le départ de leur Président qu’elles accusent de mauvaise gestion et de gouvernance clanique.

Les manifestants ont par ailleurs réclamé la libération de l’opposant et ex-Premier ministre Soumaïla Cissé, enlevé le 25 mars alors qu’il était en campagne pour les élections législatives dans sa région d’origine du centre du Mali. Le scrutin, très contesté à l’époque, avait été remporté par le pouvoir.

Cette manifestation demeure la plus grande depuis celle organisée en avril dernier par l’Imam Dicko qui avait obtenu, à l’époque, suite favorable à sa demande de démission du Premier ministre d’alors Souleymane Boubèye Maiga qui avait fini par rendre le tablier après la tuerie des civils peulhs à Ogossagou.

Mahmoud Dicko s’est converti à la politique en septembre dernier en lançant la structure de la Coordination des mouvements, associations et sympathisants (CMAS). Ce grand guide religieux a ainsi mis un pied dans le champ politique au nom, dit-il, d’une « refondation » de la société, base d’un programme qu’il réfute de divulguer pour le moment. Cet ancien président du Haut conseil islamique malien est un wahhabiste ayant fait ses études théologiques en Arabie Saoudite. Il apparait ainsi, pour certain, comme l’homme du recours face aux multiples échecs du gouvernement. En février dernier, lors d’un rassemblement qui avait mobilisé près de 100.000 personnes, l’Imam Dicko déclarait que le problème du Mali est d’abord un problème de gouvernance. Sa présence sur le terrain sécuritaire est incontestable. Il a servi à plusieurs reprises d’émissaire au Président Keita dans ses nombreuses discussions avec les groupes rebelles. Il soutient ainsi le dialogue avec les hommes armés du nord et avait déjà en 2012 rencontré le Chef touareg Iyad Ag Ghali.

Ces contorsions caligineuses observées dans ce pays qui vit depuis presque une décennie dans une instabilité incessante peuvent juguler les efforts de paix connus jusqu’ici et créés une tension dans cette vaste région ouest-africaine. Cette situation, non souhaitée, pourrait alors être source d’un printemps malien.

Une pensée sur “Va-t-on vers un Printemps malien?

  • 9 juin 2020 à 0 h 35 min
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    Belle analyse. Un printemps malien aura peut être les mêmes conséquences qu’un printemps arabe qui avait terrassé plusieurs régime. Nous espérons que vous allez poursuivre prochainement avec les déclinaisons probables de ce que vit le Mali dans la sous région.

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