Mairie de Ziguinchor : un pari très risqué pour Ousmane Sonko.


Jusqu’ici, le leader de Pastef n’a pas précisé ses intensions sur la mairie de Ziguinchor. Sera-t-il candidat à la municipalité ou est-ce qu’il va adouber un de ses lieutenants. A quelques jours de la date limite des dépôts de candidature, le leader du Pastef maintient le flou. Cette stratégie s’explique sans doute par la nécessité de bien réfléchir sur ce pari avant de s’engager.

En effet, la municipalité de Ziguinchor est un couteau à double  pour Ousmane Sonko. Si jamais il décide d’être candidat, il doit s’assurer d’abord la victoire. Cela conforterait son assise politique dans la région naturelle de la Casamance. Il sera aussi l’homme fort d’une des grandes villes du Sénégal, ce qui compte à la fois sur le plan symbolique et électoral.

En effet, les leaders qui réclament un statut national ont, pour la plupart, une base réelle conférée aux urnes par les électeurs. C’est le cas de Macky Sall, Khalifa Sall, Idrissa Seck, Moustapha Niass… Si un  homme comme Wade a dirigé le pays sans jamais s’investir dans son Kébémer natal, le leader du Pastef peut aussi incarner une posture nationale pour se mettre au dessus de la mêlée. Mais il n’en demeure pas moins que c’est un point important pour Ousmane Sonko d’être le maire de Ziguinchor.

Ne pas y aller, c’est aussi donner à ses adversaires la possibilité de l’accuser d’avoir fui le combat. Le camp d’en face lui demanderait sûrement de venir faire ses preuves au bas de l’échelle avant de prétendre accéder au sommet. La petite catégorie avant les ténors, comme disent les lutteurs.

Seulement, le pari est très risqué face à un pouvoir dirigé par Macky Sall. Avant la présidentielle de 2019, le camp de Benno, s’appuyant sur les législatives de 2017, a déclaré urbi et orbi que Sonko n’était que le candidat des réseaux sociaux. Son score de 15% à la présidentielle avec une petite coalition a montré qu’il a désormais une envergure nationale.

Aujourd’hui, Macky Sall et ses hommes seraient très heureux de démontrer au peuple que leur principal adversaire ne pèse pas grand-chose dans son propre fief, encore moins ailleurs. Et pour cela, il suffit de le battre à Ziguinchor. « Celui qui ne peut pas gagner Ziguinchor ne peut pas prétendre devenir président », serait alors l’argument favori de Benno.

Macky Sall a choisi Benoît Sambou (mairie) et Seydou Sané (département). Même si son charisme laisse à désirer, Benoît est un militant de la première heure de l’Apr. Sanctionné au lendemain des locales de 2014, il n’en demeure pas moins un fils de la Casamance, avec une légitimité à la base.

Pour Seydou Sané, le 3 octobre dernier, Macky Sall a reçu le Casa Sports, après sa victoire à la finale de la Coupe du Sénégal face à Diambars. Or, d’habitude, ce sont les sportifs qui reviennent au Sénégal avec une médaille qui ont droit à ce traitement. Certains se demandaient déjà pourquoi ce geste en faveur du club dirigé par Seydou Sané. Ils ont eu leur réponse.

Premier adjoint au maire de Ziguinchor, Sané qui a travaillé aux côtés de Baldé aux Locales de 2014, avec son mouvement Jog Taxaw, est désormais un allié assumé du président Macky Sall dont il tresse des lauriers. « Ce que le Président Macky a réalisé en Casamance, aucun Président ne l’a fait depuis les indépendances à nos jours. (…) En vérité, plus que d’en faire une priorité, Macky Sall nous a privilégiés », soutient-il, ajoutant que le président a suffisamment fait preuve d’amour à la Casamance. Sa proximité avec la population par le biais de Casa Sports peut jouer.

Mais Macky a sans doute exploré toutes les possibilités pour barrer la route à Sonko, son principal adversaire. S’il a mis Benoit, c’est qu’il n’a sans doute pas trouvé mieux. Il reste que ce choix renvoie Abdoulaye Baldé à l’opposition, sans compter la possibilité d’un vote sanction de la part des partisans de Doudou Ka (même si ce dernier semble prendre acte) et éventuellement d’autres responsables.

Il n’empêche que Macky Sall a certainement fini de mobiliser tout l’arsenal symbolique, administratif, logistique et surtout financier que lui offre l’Etat pour gagner Ziguinchor. C’est une question d’honneur et de survie de son régime. N’est-ce pas son bras droit Mahmout Saleh qui a déclaré que la candidature de Macky Sall en 2024 dépend des résultats des élections de 2022 ? Le jeu est donc à la fois ouvert et risqué.

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